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jeudi 18 avril, 2024

Les indigents de la République, l’Islam et le terrorisme par Omar MAZRI

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Les indigents de la République étalent leur ignorance, leur arrogance et leur mépris à longueur de journée sur les colonnes des journaux et dans les studios. Ils se prennent pour le nombril du monde qui connait l’Islam et les musulmans mieux que Dieu lui même au point de les interpréter selon leur courte vue et leur imbécilité qui n’ont de mesure que leur narcissisme. Voilà des siècles que les orientalistes, les islamologues de service, les assimilationnistes et les intégrationnistes tentent en vain de réduire l’Islam à leur crasse ignorante et les musulmans à leur ethnocentrisme impudique. Ils n’ont même pas la décence d’interroger l’histoire sur les sources de leurs rapports pervers avec les musulmans ni comment ils ont fini lamentablement en rupture. Aujourd’hui il ne s’agit plus de rupture avec la colonisation et le colonialisme, mais avec la relative paix sociale. Ils cultivent l’amalgame, la haine et le mépris sans se rendre compte qu’ils touchent aux sensibilités des uns et aux exacerbations des autres et cela va finir par instaurer les ferments d’une guerre civile. Personne dans ce pays ne veut assumer ses responsabilités et dire ça suffit. Tous délirent atteint de la charlite. Même les gouvernants et les parlementaires de plus en plus charlot qui ne font pas rire règlent leur contentieux et étalent leur déboire à coup de Charlie par ci Charlie par ça.

L’amalgame avec les musulmans et les terroristes et la confusion de la France avec « Charlie » non seulement n’expliquent pas la vraie crise, mais ils la cachent tout en l’entretenant. Ces voyous qui veulent jouer aux philosophes et aux cultivés savent que le terrorisme qui a détruit la Syrie et la Libye et qui se manifeste d’une manière infantile sur le sol européen est l’œuvre de la politique insensée et criminelle de l’Occident à l’égard des musulmans. DAESH et consort sont une inspiration occidentale dont les premiers, les plus nombreux et les plus sévèrement touchés sont les musulmans. Si ces mêmes occidentaux et leurs interlocuteurs valides et leurs saltimbanques se réclamant de l’Islam ou de la communauté musulmane avaient réellement éprouvé de la compassion pour les musulmans et de l’intérêt pour les Coptes d’Égypte et les Chrétiens du Moyen-Orient, ils auraient cherché la paix et la coopération entre les peuples. L’intégrisme laïciste et l’implacable justice impériale savent raconter des histoires pour peuples abrutis par le crédit, le sexe et l’oisiveté ou peuples dépossédés de leur devoir par l’ignorance insouciante. Dans ces histoires, les experts de la fabrication du consentement idéologique et de la fascination médiatique inventent des mythes, des totems et des fétiches pour cacher la fin de l’histoire, celle de leur monde en décomposition écologique, économique et politique.

Les indigents et les indigènes de la République s’accordent pour dénoncer l’islamophobie après avoir pris la précaution de la vider de son contenu et de sa portée de machine de guerre médiatique, politique, idéologique et militaire au service de l’Empire qui tente de remodeler le monde alors que ce monde lui échappe de plus en plus le laissant dans la confusion et laissant les peuples qui subissent cette confusion dans l’horreur.

L’islamophobie n’est pas la xénophobie. Historiquement et anthropologiquement la xénophobie est une sorte de catharsis sociale et idéologique qu’une société en crise s’invente pour se guérir de ses peurs, de ses doutes, de ses malheurs. La société, ses idéologues et ses gouvernants refusent de voir la réalité qui a présidé au funeste destin pour se contenter d’un bouc-émissaire qui en général est l’étranger, cet autre qui est à la fois soi même qui fait peur car on lui retrouve les mêmes impulsions et les mêmes convulsions et l’autre différent de soi par sa religion, son ethnie, sa sociologie, sa langue et sa culture. Cet étranger n’est pas obligatoirement celui qui vient d’une autre contrée, il est souvent la minorité faible ou celle qui est montrée du doigt pour conjurer le mauvais sort. C’est le comportement infantile et irresponsable de toutes les sociétés en décomposition, en fabulation et en quête d’identité dans un malheur qu’elle refuse de comprendre ou d’assumer.

Les indigents et les indigènes de la République qui veulent confiner l’Islamophobie aux banlieues françaises et réemployer les termes de « visibilité musulmane » que la France a utilisé pour monter des notables musulmans contre  l’Islah badissien des Oulémas se trompent de lisibilité du monde. La France n’est plus la puissance coloniale. La banlieue ne produit pas encore sa visibilité car elle ne produit pas encore ses idées, son argent et son élite ou son projet. La communauté souffre davantage de xénophobie structurelle alimentée par le racisme, les stigmates de la venue des travailleurs algériens et africains dans des conditions d’esclaves, l’inégalité des chances et l’assistanat social qui a produit le non citoyen soucieux de la rente et méconnaissant ses droits et devoirs, le déni de culture et la mise au ban. Tous ces ingrédients sont exponentialisés  par l’échec de l’intégration menée bureaucratiquement et par le mépris, les crispations sociales de la crise économique, l’affectivité exacerbée de ceux qui pensent que leurs parents ont été exploités sans rien en contrepartie et que la France a été ingrate envers eux. Nous sommes au cœur du processus de xénophobie. Nous sommes au cœur du drame de la désintégration des populations par marginalisation, acculturation et déculturation, culture de l’échec scolaire et de l’exclusion. L’inégalité des moyens, des possibilités et des chances dans un monde de tarissement des ressources et des idées provoquent de la colère, du ressentiment, de la méfiance, de la violence, de la provocation sans plus. Le plus est dans l’abandon et la victimisation puis la criminalisation des plus fragiles. Dans ce tableau sombre l’identité revendiquée arabe, africaine ou musulmane des parents est dénigrée, culpabilisée, méprisée car la France est raciste, la France est contre la différenciation, elle est pour l’indifférenciation qui uniformise au nom de l’égalité des droits. La xénophobie est une donnée locale nationale avec son rapport à l’histoire et la sociologie française, ses solutions sont locales ou nationales : liberté, éducation, égalité de chances et respect de la différence. Les communautés ne sont pas imperméables à la doxa islamiste ni à l’islamophobie, elles les vivent comme l’air du temps, comme la drogue, la réussite ou l’échec scolaire : des faits, des informations.

L’islamophobie c’est un autre registre, un autre objectif, une guerre de religion, une guerre de civilisation qui met le monde musulman avec ses juifs, ses chrétiens et ses musulmans face à la menace de dissolution ou d’agression par l’Empire qui vise leur position géopolitique, leurs ressources économiques et leur potentiel d’éveil civilisationnel pour les maintenir en marge du monde dans des guerres qui leur sont imposées par l’Empire et ses vassaux. Par l’islamophobie, les nostalgiques de l’Algérie française, des comptoirs commerciaux de la colonisation, de l’école franco musulmane sont appelés à contribution idéologique, mais ils n’en sont ni les concepteurs, ni les décideurs ni les agents. Ces derniers sont préoccupés par le réveil du monde musulman et sa jonction avec la Russie pour la construction du monde nouveau protégé de l’hégémonie anglo-saxonne et de leurs vassaux européens et arabes.

L’islamophobie et la russophobie instrumentalisent la xénophobie, mais ce sont des objectifs psycho-géopolitiques pour un Empire et ses vassaux en perte de puissance et qui veulent maintenir l’immobilisme mondial et leur hégémonie en faisant la guerre hors de leurs frontières, en continuant la prédation des autres territoires, en aiguisant les paradoxes qui alimentent les peurs, les méfiances, les défiances, le recours à l’arbitrage ou à la domination du puissant du moment. Les politiques, les médias et leurs larbins participent au montage de la narrative dans un jeu de rôle de pervers narcissiques qui s’inspirent mutuellement pour entretenir la confusion. Dans la confusion et l’ignorance instrumentalisée, bien entendu on ne se chagrine pas pour l’Irak et la Syrie. Avant le gouvernorat américain, l’Irak était un pays relativement paisible sans drogue ni terrorisme. Si le monde arabe et musulman était gouverné par des gens sensés jamais les insensés n’auraient eu l’idée de revendiquer un Kalifat islamique au nom duquel et au nom du dieu qu’ils ont inventé dans leur délire, il y aurait eu attentat à la vie humaine dans des conditions horribles. Sans l’expédition punitive des français pour le compte des américains jamais la Libye ne serait devenu un sanctuaire du crime. Les imposteurs et les falsificateurs de l’Islam qui ont encouragé les folies occidentales ou qui ne les ont pas dénoncé sont pires que Charlie et ceux qui s’en réclament. Ces derniers peuvent toujours se réclamer d’être les produits d’une civilisation qui a perdu le sens de la mesure et de la morale. On peut les désapprouver, mais on ne peut manquer de reconnaitre leur cohérence et leur engagement pour ce qui leur a semblé être vérité.

Pour l’instant ce sont les insensés de tous bords et le sionisme qui tirent profit de la confusion en reprenant des positions perdues depuis des années.

Pour le moment le terrorisme subit par les Palestiniens n’émeut personne. L’idée de présenter les résistants palestiniens comme des terroristes islamistes est une idée vieille qui a besoin de criminaliser davantage l’Islam et les musulmans. La même idée vise également à contraindre les Chrétiens arabes à se désolidariser des causes arabes et tout particulièrement de la cause palestinienne. Les intelligents de l’Occident ont européanisé Jésus de Nazareth le fis de Marie, ils ne peuvent concevoir une autre idée du christianisme lors qu’enfin ils parviennent à « tolérer » le fait religieux après l’avoir vidé de sa transcendance et de son sacré pour une historicité profane qu’ils dessinent selon le centre et le rayon de leur propre compas idéologique. S’ils avaient conservé leurs repères chrétiens ils auraient vu la profanation de Jérusalem et la terrorisation des populations. On peut donc s’interroger sur la crédibilité et la sincérité de celui qui vogue sans repères ou qui œuvre pour la suprématie des repères d’autrui au détriment de son propre pays.

Mieux qu’un discours, la fable « Les Animaux malades de la peste » de Jean de la Fontaine peut encore éclairer les membres du temple la République s’ils faisaient l’effort d’assiduité écolière :

Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu’il faut l’appeler par son nom)
Capable d’enrichir en un jour l’Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés :
On n’en voyait point d’occupés
A chercher le soutien d’une mourante vie ;
Nul mets n’excitait leur envie ;
Ni Loups ni Renards n’épiaient
La douce et l’innocente proie.
Les Tourterelles se fuyaient :
Plus d’amour, partant plus de joie.
Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L’histoire nous apprend qu’en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L’état de notre conscience.
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J’ai dévoré force moutons.
Que m’avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m’est arrivé quelquefois de manger
Le Berger.
Je me dévouerai donc, s’il le faut ; mais je pense
Qu’il est bon que chacun s’accuse ainsi que moi :
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable périsse.
– Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce,
Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur
En les croquant beaucoup d’honneur.
Et quant au Berger l’on peut dire
Qu’il était digne de tous maux,
Etant de ces gens-là qui sur les animaux
Se font un chimérique empire.
Ainsi dit le Renard, et flatteurs d’applaudir.
On n’osa trop approfondir
Du Tigre, ni de l’Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Tous les gens querelleurs, jusqu’aux simples mâtins,
Au dire de chacun, étaient de petits saints.
L’Ane vint à son tour et dit : J’ai souvenance
Qu’en un pré de Moines passant,
La faim, l’occasion, l’herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n’en avais nul droit, puisqu’il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet.
Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu’il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d’où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l’herbe d’autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n’était capable
D’expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.

Si on devait se montrer plus intelligents, plus lucides et plus percutant on irait chercher la solution foudroyante : faire élire Marine au premier tour. Si les musulmans s’étaient organisés et avaient pris en main leur destin social et politique au lieu de se laisser conduire comme des veaux de France, ils auraient la possibilité de provoquer le changement en faisant sauter le système en place. Le système en place instrumentalise les anciens clivages, les fausses peurs et la rente pour durer dans l’alternance de l’immobilisme. Un peu de courage et de sens de responsabilité ainsi qu’une alliance stratégique sur la famille, la morale, le travail, la lutte contre le capitalisme, les intérêts nationaux, la justice équitable, la liberté de culte et tant de valeurs humaines peuvent rapprocher des points de vues qui semblent paradoxaux.

La charia n’est pas cette caricature véhiculée par les infantiles et les handicapés de l’Islam ou par ses détracteurs et ses ennemis, mais la circonspection de l’intelligence du croyant pour s’assurer le salut dans l’au-delà ainsi que dans ce monde dans ses contradictions et ses épreuves. La charia nous ordonne, après la foi, de peser sur notre destin en témoignant avec justice et en agissant avec justesse pour notre bien et celui des autres. Elle nous ordonne de peser sur les événements en identifiant les priorités. Le pacte de Médine est un pacte citoyen par excellence. Même si nous n’avons ni les conditions ni les possibilités de le reconduire nous pouvons nous en inspirer pour définir ce qui serait le mieux pour nous et pour les autres sur le long terme et dans le  pire des cas. Le pire devient de plus en plus probable et il n’existe aucun lieu sur terre où l’homme peut prétendre à la solitude ou à l’isolement. Demeurer insouciant et immobile, se contenter de dénoncer les autres ou de faire l’apologie de l’Islam sans contexte territorial et social c’est porter atteinte à la Charia. La Charia n’est pas la compilation des peines pénales et civiles du droit musulman, mais l’écologie morale, spirituelle, sociale pour bien vivre, pour vivre dans la dignité et la prospérité. La Charia c’est ma liberté et celle des autres sans transgression des droits des uns par la violence des autres. La violence n’est pas que policière ou militaire elle est aussi idéologique et médiatique. Extirper les membres de la communauté musulmane pour en faire des larbins de la gauche ou de la droite ou des auxiliaires de travail est une violence subie par les musulmans. Elle doit cesser par un nouveau positionnement et une prise de responsabilité. Ce serait encore de l’irresponsabilité suicidaire que d’aller fonder un parti se réclamant d’une singularité religieuse ou communautaire ou de se proposer comme candidat idiot utile. Il faut oser jouer la carte du changement radical, il faut la jouer politiquement et socialement, mais non individuellement. Il est difficile d’être politique sans être partisan ou politicien et pourtant c’est que nous devons tenter si nous prenons le temps de méditer ce qui s’est préparé depuis le 11 septembre et ce qui se prépare est sans doute plus grave. Devant la gravité nous ne pouvons pas laisser les insensés parler en notre nom ni les indigents agir contre nous.

Il n’y a point de vent favorable pour celui qui ne sait où aller...

Omar MAZRI – www.liberation-opprimes.net

Rédaction

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